° Rubrique philo-poche 

Cours de  PHILOSOPHIE par J. Llapasset

Philo-poche

L' ÉTAT 

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I. Autour du mot: la société, la nation. 

- Une société, ensemble d'individus qui travaillent et échangent, a besoin de stabilité et donc d'institutions qui ordonnent les "mouvements", en disant le droit, et qui assurent l'administration selon le droit: autant dire que société et état tendent à être articulés comme le contenu, la société, à la forme, l'État.

- La nation (de nascere = naître), comme ensemble d'individus nés dans un même pays, se distingue de l'Etat comme la nature se distingue de la culture, comme l'existence se distingue de l'essence. Pourtant, de même qu'il n'y a pas d'existence sans essence, il n'y a pas de nation sans d'État: la nation est terreau ou milieu sans lequel, il manquerait à l'Etat ce qui le "cimente", la force du sentiment national qui, en le parcourant, l'unifie et le fait vivre.

- Nation, société, Etat pour être distincts n'en sont pas moins en étroite relation, un peu comme l'âme et le corps, au point que, sans l'Etat, nation et société disparaissent dans le chaos de la guerre civile.

  II. La notion: le parcours. 

- Par essence, l'État est un système qui se tient debout (stare) face aux changements, et qui domine une communauté déjà en partie unifiée par le travail et le sentiment national.

- C'est un système d'institutions organisées en vue de l'action propre à assurer le bien commun, ce qui implique que la loi juste sera celle qui vise le bien commun: comprenons que les éléments du système vont alors s'articuler en fonction de leur rapport à la loi: comme être de raison, la loi ne peut être que pour tous (égalité) et par tous (liberté comme autonomie): elle présente une alternative à la violence des lois de la nature: elle est le fruit de la concertation, la conversation substituée à la violence.

- L'Etat est un système d'institutions solidaires déduit (sorti de) de la double universalité de la loi qui institue l'égalité et la liberté, donnant ainsi la souveraineté au peuple, ensemble des citoyens, ou corps électoral qui choisit, par élection, le parlement.

- Le parlement, qui émane de tous, vote (ou se propose à lui-même) des lois que le gouvernement lui propose.

L'administration applique les lois par la justice, les diverses forces de police...
Enfin, deux organismes veillent à la conformité des lois.

  • Ont-elles la double universalité (pour tous, par tous)?

  • Respectent-elles la constitution, sorte de loi fondamentale qui organise la hiérarchie de l'État et garantit les droits des personnes?
    Il s'agit du Conseil d'État et du Conseil Constitutionnel.

- Il apparaît clairement que sans un tel système démocratique, les maîtres prolifèreraient et que ni l'égalité, ni la liberté, ni le respect des personnes ne pourraient exister. Toute critique de l'État revient donc à le confondre avec des simulacres d'états qui n'ont rien à voir avec lui. Mais l'État, garant de l'État de Droit est en réalité la condition nécessaire de la vie et du respect des personnes.

- C'est que l'État a pour rôle de rappeler les valeurs essentielles de justice, égalité, liberté et de sécurité sans laquelle liberté et égalité ne sont plus que des ombres.

- C'est l'État qui présente et explique les problèmes de l'époque, propose des solutions dont il assurera la mise en œuvre en orientant et en dynamisant les efforts des citoyens. L'Etat n'est pas un "monstre froid" mais un ensemble de personnes qui agissent et sont contrôlées par la communauté qui, en démocratie, a toujours le dernier mot.

- C'est dire que l'État a la lourde tâche:

  • d'assurer la survie de tous chaque fois que des ennemis extérieurs ou intérieurs menacent.

  • de préserver les personnes contre les processus économiques aliénants

  • de suivre, d'encourager, et de surveiller l'évolution des techniques.
    Il a aussi le rôle ingrat de résister aux groupes de pressions et de contraindre ceux qui ne renoncent pas à la violence physique ou morale.

  • Le but de l'État, sa finalité, est de garantir à chacun la possibilité de créer et de suivre une manière de vivre qui soit la sienne:
    La personne comme sujet moral et sujet de Droits, voilà la finalité de l'Etat.

-Comme institution, comme être de raison, l'Etat n'existe pas, il a besoin d'organes car ce qui est simplement écrit est mort tant que cela n'est pas dit et vécu: cela signifie que, sans des citoyens qui réfléchissent, pensent, parlent en son nom l'Etat n'est rien: il s'incarne donc dans des citoyens et prend vie de leur autonomie, de leur fidélité au texte et surtout de leur capacité à obéir à la représentation des lois plutôt qu'aux intérêts particuliers des gens qui les sollicitent: autant dire que l'État se pense dans des lois qui vivront comme morale, comme autonomie.

- L' Etat pour survivre se doit donc de veiller à l'éducation des citoyens: par l'éducation chaque individu s'élève au rang de sujet moral capable, en maîtrisant les impulsions des lois de la nature, de s'obliger lui-même par la représentation des lois nées de la concertation. La démocratie n'est peut-être que l'idéal d'un homme - Dieu.
L'opposition de la morale et de la politique masque mal les compromissions sournoises: en invoquant la raison d'Etat on n'a rien compris à la question et on se soucie davantage des intérêts particuliers que du bien commun.
On distinguera la violence et la force: alors que la violence est irrationnelle, emportée, au service des appétits particuliers, au contraire la force est rationnelle (née d'un calcul), mesurée, au service de la loi et donc au service de tous.
L'Etat qui utiliserait la violence, n'est donc pas un état, mais le simple nom d'un groupe d'intérêts qui refuse le dialogue parce qu'il croit savoir et ne sait pas qu'il croit.

- Parce que la philosophie commence avec la distinction de l'opinion et de la science qui creuse un désir de vérité et de justice et engage dans une enquête, parce que tout effort pour penser est un engagement avec autrui, parce que toute "enquête avec" implique l'espérance d'un accord possible, l'éducation du citoyen, la vie de l'Etat et des personnes, passe par la réflexion philosophique: la maïeutique, c'est toi qui le diras.

 Quelques citations:

"L'Etat, c'est le plus froid de tous les monstres froids... Voici le mensonge qui s'échappe de sa bouche: "Moi, l'Etat, je suis le peuple". Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra.

"L'Etat est seulement cette partie du corps politique dont l'objet spécial est de maintenir la loi, de promouvoir la prospérité commune et l'ordre public et d'administrer les affaires publiques." J. Maritain, L'Homme et l'Etat, pages 11 et 12

"L'Etat est l'ensemble organique des institutions d'une communauté historique" E. WEIL, philosophie politique page 131

"Chacun veut vivre aux frais de l'Etat. Mais tout le monde oublie que l'Etat vit aux frais de chacun." Bastiat.

=> Voir la page synthétique: L'ETAT

Pistes de lectures:

Aristote: Politique, livre I.
Kant: Idée d'une histoire universelle d'un point de vue cosmopolitique, IV ème proposition.
Hobbes: Léviathan, chap. 13 à 16
Rousseau: Du contrat social
Rousseau: Emile, Livre IV: Texte essentiel sur le rôle pédagogique des lois, quel qu'en soit le contenu.
Lénine: L'Etat et la Révolution, (Editions sociales)
Marx et Engels: L'Idéologie allemande, (Editions sociales, p.61 et 62)
J. Freund: L'Essence du politique, (Sirey)
F. Engels: Origine de la famille, de la propriété privée et de l'Etat
G. Burdeau: L'Etat, (Le Seuil 1970)
E. Weil: Hegel et l'Etat, (Vrin)
Foucault-Deleuze: Les Intellectuels et le Pouvoir, (L'Arc, n°45 - 1972)
Patrice Canivez: Eduquer le citoyen (coll. Optiques de Hatier)

=> page 2

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