Prenons
6 affirmations qu'il est possible d'entendre prononcer:
1)
La philosophie (X) est une perte de temps (Y)
|
2)
L'homme (X) se penche sur son passé (Y)
|
3)
L'humanité (X) peut se passer des Beaux-Arts (Y)
|
4)
L'artiste (X) est seulement un technicien (Y)
|
5)
L'art (X) est inutile (Y)
|
6)
L'histoire (X) est une science (Y)
|
Il
est possible de trouver des caractères communs à ces 6
affirmations:
a)
Ce sont des jugements de la forme S est P qui relient
deux concepts X, Y
|
b)
Ces jugements sont affirmatifs: en ce sens ils se présentent
comme vrais et -qu'ils soient effectivement vrais ou
faux- ils se réfèrent à l'idée de vérité: ils
affirment ce qu'ils affirment
|
c)
Ces jugements sont tous présentés comme évident (ça
se voit!), mais ils portent sur ce qui ne se voit
pas puisqu'ils affirment une inexistence: en effet ils
portent sur l'inexistence d'un "petit quelque
chose" d'autant plus facilement que ce petit rien
n'est pas observable dans le milieu de l'extériorité,
ne se voit pas: c'est évident parce que cela ne se voit
pas que ça n'existe pas comme si, une joie n'existait
pas parce qu'on ne pouvait pas déclarer après l'avoir
mesurée qu'elle pèse 3 kilos: tautologie dérisoire à
partir d'un postulat: tout ce qui ne se voit pas ne peut
être évident = tout ce qui n'est pas évident n'existe
pas.
|
d)
Tous ces jugements sont des opinions nées de la
confusion de l'affirmation et du contenu: dans toute
opinion il y a:
-ce qu'elle affirme: le contenu. Elle peut être vraie
(rectitude, adéquation à la sensation de l'objet ou
fausse.
-l'acte d'affirmer: la forme. L'opinion affirme l'acte
d'affirmer.
Cette distinction du contenu et de la forme permet de
tout affirmer, le sophiste Gorgias peut alors défendre
n'importe quelle thèse: parce qu'il identifie la forme
au savoir le sophiste peut opiner sur tout quelque soit
le contenu, ce qu'il affirme:
"Que son opinion soit juste ou erronée, le sujet
qui juge ne perd évidemment jamais la réalité qu'est
son acte de juger" Platon Philèbe 37 a
Autrement dit c'est vrai parce que je le sens et non
parce que je le pense!
|
e)
Il suffit de désirer la vérité, de savoir qu'on ne
sait pas avant d'avoir cherché et donc de rendre ces 6
jugements interrogatifs (c'est le même qui interroge et
qui répond) pour obtenir autant de sujets du baccalauréat
et le point de départ d'une recherche, d'un acte qui
"drague" (philos) la vérité (sophos). On ne
cherche qu'à partir du moment où on éprouve un
manque: il faut donc chercher ce qui manque à ces
affirmations, les problématiser.
|
Les
sujets proposés:
1)
La philosophie est-elle une perte de temps?
|
2)
Pourquoi l'homme se penche-t-il sur son passé?
|
3)
L'humanité peut-elle se passer des Beaux-Arts?
|
4)
L'artiste n'est-il qu'un technicien?
|
5)
L'art est-il inutile?
|
6)
L'histoire est-elle une science?
|
Il
est possible de trouver des caractères communs à ces 6 sujets:
a)
Tous ces sujets portent en fait sur l'existence
ou l'inexistence d'une utilité: on pourrait
les ramener à:
-à quoi bon la philosophie, l'histoire, les Beaux-Arts,
le moi de l'artiste?
|
b)
L'utilité étant la satisfaction d'un
intérêt, ces sujets portent en fait sur ce qui peut intéresser
l'homme, sur l'homme comme être raisonnable
sensiblement affecté qui désire, qui a des projets.
|
c)
Ces sujets exigent que l'on prenne en considération leur
contenu, c'est à dire que l'on détermine dans
tous les cas ce que cela est: X et Y
et qu'on s'interroge, à partir des caractères que la détermination
a fait apparaître, sur les relations possibles ou
impossibles entre les deux concepts. Il s'agit
d'entreprendre la démarche contraire de celle du
sophiste: partir de la reconnaissance d'un non savoir et
procéder à une enquête sur l'acte de
philosopher par exemple, dans le sujet 1)
|
d)
Tous ces sujets invitent à une comparaison de
concepts: par exemple dans le sujet (4): le
concept artiste "déborde-t-il" celui de
technicien ou lui est-il réductible?
|
e)
On serait tenté de déduire le plan de la comparaison
de X et de Y. Par ex:
La première partie rapproche la technique et l'art, ce
qui permet de répondre que l'artiste est en ce sens un
technicien;
La deuxième partie éloigne X et Y ce qui permet de répondre
que l'art est la production du beau comme moi rendu
sensible. MAIS, il ne faut jamais
oublier que, contrairement aux mathématiques dans
lesquelles la définition est admise comme point de départ,
en philosophie la bonne définition, bien ajustée, est
un résultat. En conséquence le plan
sera à la fois dialectique et progressif, par
approfondissement de notions:
construction des définitions de plus en plus riches et
de mieux en mieux ajustées
|
|