Préliminaires:
toujours se demander ce qui dans le libellé du sujet fait problème:
le problème c'est la question de la question, ce qui dans la
question posée oblige à poser une question plus fondamentale.
Sans
se décourager, chercher ce qui surprend: on dit couramment le
temps, mais le sujet évoque un temps, comme si,
il y en avait plusieurs! Comment se fait-il qu'on parle d'un
temps alors que le temps semble le même pour
toute conscience qui est mémoire et anticipation: un futur qui
devient présent et qui plonge dans le passé de sorte que "voir
venir, voir passer" semble être notre
condition à tous. Qu'il y ait un temps propre à l'acte de
philosopher semble suggérer que cet acte fait
exister un rythme et un contenu particulier par lequel il
s'approprie en quelque sorte cette forme du temps, en lui donnant
le contenu qui convient à l'acte de philosopher, à la fin qu'il
désire.
Nous voilà
renvoyés à la détermination de l'acte de philosopher comme acte
de penser par soi-même avec pour fin la vérité et la justice et
pour moyen une enquête qui s'efforce d'ajuster un discours à ce
qui est. L'origine de cet acte est la découverte d'un manque éprouvé,
la distinction de l'opinion et de la science. "Je
sais que je ne sais rien", répète Socrate:
cela signifie que l'opinion qui se contente d'affirmer les données
de la conscience immédiate ne suffit pas. L'acte de philosopher
ne se définit pas car c'est un désir, un mouvement vers une fin
qui ouvre (fait exister) un temps qui lui est propre: c'est une
manière de s'approprier le temps; Il y aura donc un
temps de l'acte de philosopher, un
temps de la religion, un temps de la
science et même un temps
de la science économique (page en préparation).
Il
devient possible de comprendre le sujet: il interroge non
seulement sur le moment d'une époque le plus propice à la réflexion
(Hegel: l'oiseau de Minerve prend son vol à la tombée de la
nuit), non seulement sur l'âge de la vie qui convient à l'acte
de philosopher mais encore sur le temps particulier qui convient
à l'acte de philosopher et que l'acte de philosopher fait donc
exister. Ne pas voir ce dernier point reviendrait à refuser
inconsciemment le sujet.
Voici une
proposition de plan:
I.
Il y a un temps, comme moment d'une époque pour réfléchir
sur ce qui s'est déroulé: bien évidemment c'est la
fin (ou la décadence = Voir Hegel)
|
II.
Il n'y a pas d'âge particulier de
la vie pour philosopher (voir Épicure = Lettre à Ménécée)
|
III.
Il y a effectivement un temps pour
philosopher: l'acte de philosopher fait exister un temps
qui lui est propre (par exemple la décision: on prendra
son temps sans s'occuper de l'horloge à eau, la
clepsydre du temps de Platon)
|
Voici quelques
conseils pour l'argumentation:
1)
On pose d'abord ce que l'on veut établir
qui doit être une réponse au sujet: par exemple L'acte
de philosopher fait exister son propre temps en fonction de son désir,
du manque qu'il éprouve; Amour est philosophe.
2)
Il s'agit de rendre évidente,
incontestable l'affirmation que l'on vient de poser, de la
justifier.
3)
On va s'appuyer sur ce qui
est incontestable parce que, admis par tous: des définitions, non
pas des points de départ comme en mathématique, mais des
propositions ajustées progressivement à ce que cela est.
4)
Il s'agit de déduire
(sortir de) des définitions évidentes le 1).
Voici un exemple
d'argumentation construite avec une classe:
L'acte
de philosopher fait exister son propre temps. Mais qu'est-ce que
le temps? Pour une conscience cela ressemble à un mouvement par
lequel le futur se change en présent et le présent plonge dans
le passé: cette forme du temps s'impose à toute conscience qui
voit venir et voit passer sans cesse, comme une forme que le
hasard et la nécessité remplissent. Tant qu'il n'y a pas de désir
qui donne un contenu au futur, le temps ne s'ouvre pas pour moi.
Sans désir, sans projet, il n'est rien dans ce temps qui vienne
de moi. Mais, précisément, l'acte de philosopher a pour point de
départ un manque éprouvé de la vérité et de la justice, un désir.
En ce sens Socrate répète "Je sais que je ne
sais rien".
Autant dire que la distinction de l'opinion et de la science est
constitutive de l'acte de philosopher car elle creuse un manque: découvrir
que le sensible ne nous donne pas l'essence, ce que la chose est,
produit un mécontentement devant la découverte qu'on ne sait pas
et en même temps le désir de savoir, le désir de la vérité:
un tel désir ouvre un futur, celui de l'enquête: la recherche de
la vérité et de la justice fait bien exister un contenu du temps
comme organisation, rythme approprié à la recherche de la vérité.
Par exemple Socrate exige toujours que l'on prenne son temps, le
temps du dialogue et de la maïeutique, le temps qu'exigent les détours
nécessaires à la recherche. C'est donc bien une appropriation du
temps, un temps propre que l'acte de philosopher fait apparaître.
Ce qui signifie que ceux qui sont pressés, ceux pour qui le temps
c'est de l'argent, ceux qui cherchent le simplement utile ne
peuvent philosopher.
Pour
l'introduction ...
Il
est possible de partir de l'opinion, de la distinguer de la
science ce qui oriente nécessairement le devoir vers l'acte de
philosopher, l'acte de penser, de peser le pour et le contre,
avant de prononcer un jugement:
Par exemple:
Beaucoup, effrayés par l'acte de réflexion,
affirment que la philosophie est une perte temps, une vanité et
qu'il n'y a donc pas de temps pour philosopher. Mais, en étant
pressés d'agir et en refusant de prendre le temps, ils signifient
par là que ce temps peut exister.
Il
faut maintenant préciser le problème (voir plus haut).
On peut aussi annoncer les trois parties
du sujet de préférence sous forme de questions: la règle d'or
de l'introduction est de ne jamais répondre au sujet (c'est le développement
qui s'efforce de répondre).
Enfin l'introduction peut se terminer par la mise en évidence de
l'enjeu d'un tel sujet: il s'agit ni plus ni moins que de
l'existence de l'acte de philosopher car un désir qui n'ouvre pas
sur une appropriation du temps reste à l'état de simple souhait.
et
la conclusion...
Il
est possible de conclure en trois ou quatre phrase: la règle d'or
de la conclusion est qu'elle ne continue en aucun cas le développement.
a)
une phrase synthétique prend ensemble, fait le bilan de ce que
l'argumentation a justifié, c'est toujours un effort pour répondre
au sujet (règle d'or)
b)
une phrase déduit (= sortir de ), du bilan une conséquence théorique
ou pratique (cela correspond à l'enjeu)
c)
Faut-il terminer par une question? OUI à la condition que
ce ne soit pas la question du sujet ou le problème. Il s'agit de
rebondir en quelque sorte vers un autre sujet possible impliqué
pour ainsi dire par le développement qui précède. Par exemple: N'y
aurait-il pas un temps propre à chaque désir et donc à chaque
subjectivité qui serait très simplement l'appropriation du temps
par la liberté? Mais c'est un autre sujet...
(Éviter les questions bateau du style: qu'en
sera-t-il demain?)
Conseils
de lecture
Voir Le
temps.
Platon:
"La République" (fin du livre VI et début du livre
VII- Voir dans Philo-notions/bac "Le soleil, la ligne la
caverne"
Épicure:
"Lettre à Ménécée"
Hegel: "Principes de la philosophie du
droit" Vrin 1989 pages 55/58 (Les chemins de la pensée
Hatier page 416/417).
Alain: "Éléments de philosophie", 13.
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